Les chiens
mercredi 29 janvier 2025
Caran d’Ache, Librairie Hachette et compagnie éditeur, 1906-08. Collection Musée du Jouet de Poissy, inv.MJ.88.43.23.1.1 à 6 Don Briant
Ces charmants toutous, drôles et attachants, plus vrais que nature, sont l’œuvre de Caran d’Ache, illustrateur célèbre qui exerça ses talents au service du jouet dans les années 1906-1909.
On reconnait le basset roux sur planchette avec oreilles mobiles (manque probablement les roues), le teckel aux pattes et oreilles articulées, le caniche noir sur planche à roulettes, le ratier debout à tête mobile, le fox-terrier, en position assise, le ratier assis avec sa langue pendante. Ils mesurent de 18 à 36 cm de long, et sont fabriqués en bois découpé et peint, signés Caran d’Ache.
De son véritable nom Emmanuel Poiré (1858-1909), il était le petit-fils d’un officier de Napoléon devenu maître d’armes à la Cour impériale de Russie. Il arriva en France en 1877, après une jeunesse passée à Moscou. Son pseudonyme correspond à la transcription phonétique de [karandash] : « crayon » en russe. Il débuta dans la presse satirique, notamment les revues Le Rire, La Chronique parisienne, Le Figaro ou La Vie militaire, où il fit la connaissance de Job, autre illustrateur ayant versé dans le jouet, et présent dans les collections du musée. Souhaitant cependant devenir peintre militaire, Caran d’Ache fut brièvement l’élève d’Édouard Detaille, et se fit connaître dans le journal et cabaret du Chat noir de Rodolphe Salis, à Montmartre.
Atteint de neurasthénie dès 1903, Caran d’Ache abandonna progressivement son activité de dessinateur de presse et ne se consacra plus qu’à la création de jouets en bois, silhouettes d’animaux ou de personnages découpées et peintes, portant « la griffe du maître caricaturiste ». Présentés pour la première fois au Salon des humoristes organisé par le journal Le Rire en 1907 au palais de Glace à Paris, ils seront ensuite diffusés par la Librairie Hachette qui en acheta les droits exclusifs, et les fit reproduire d’après les modèles fournis par l’artiste.
Le Comptoir des jeux et jouets des Grands magasins du Louvre en faisait la publicité en 1910 sous le slogan : « C’est un jouet…, et en même temps une œuvre d’art. Les petits s’en amuseront ; les grands l’admireront ».
Ces jouets, d’une grande qualité esthétique, illustrent le renouveau du jouet français qui se manifeste dans les années 1910-1920, notamment dans le contexte de la concurrence du jouet en bois allemand. Des artistes, comme Caran d’Ache, Benjamin Rabier, André Hellé, Job, etc., initient alors ce que l’on nomme aujourd’hui le « jouet d’artiste » qui séduit par sa forme les enfants comme les adultes, qui est produit en petite série, et qui - sauf exception - reste relativement coûteux.
Le Musée du Jouet de Poissy détient trois lots de jouets signés Caran d’Ache : les Chiens (1906), la Chasse de Charles 1er roi du Portugal (1907), ainsi que le Dromadaire et son chamelier (1907).